Souvenirs de Théophile

Théophile et sa passion : les paniers

Deux ans avant sa disparition, Théophile évoquait son enfance

Photographie de Samuel Baron (2015)

La famille

Je m’appelle Théophile , mais bien souvent, on m’appelle Théo. Je suis né le 24 novembre 1930 à Treillières.

Je suis né dans un château. Mes parents étaient au château. Ils étaient cultivateurs tous les deux. Mon père s’occupait de nettoyer autour du château et ma mère s’occupait au château. Je suis arrivé à 3 mois à Puceul, au Sauzay, dans une ferme. Mes parents étaient là en ferme, au Sauzay.

Dans les années trente, on était six enfants (trois frères et trois sœurs). C’est moi l’aîné, ensuite Gisèle, Jean, Bernadette, Anne et André. Après Gisèle, il y a eu Jean, tous les deux ans à peu près. Après Jean, il y a eu Bernadette qui est née en 1938. après il y a eu Anne. C’est ma filleule. Puis il y a eu André mon frangin. Il est venu 17 ans après moi.

La Naissance d’André

Si je rappelle, André serait né en 1947. une année où il faisait froid. C’est moi qui est allé à Nozay chercher la sage-femme. Il n’y avait pas de téléphone.

En vélo, il faisait un sacré froid, j’ai fait trois tournées sur Nozay. La première fois, ce n’était pas encore le moment, elle est revenue dans la journée, ce n’était pas encore le moment. Il a fallu que je retourne à Nozay à 2 heures du matin.

Mon père a dit : « Vas à Nozay chercher la sage-femme, ne muse pas ». j’étais rendu à Nozay, j’étais gelé.

C’était Mme Bouteiller qui faisait l’accouchement. Elle m’a dit : « Je ne vais pas pouvoir vous emmener ».

Elle avait une petite Deux-chevaux. On ne peut pas mettre le vélo.

Je pédalais bien en ce moment, je suis arrivé presque aussitôt après elle. Elle m’a doublé à peu près à Beaulieu.

Les débuts à l’école primaire

A l’école primaire, je suis allé à l’école publique.

Il y avait l’école des gars et l’école des filles à la salle polyvalente maintenant. J’étais à l’école du bas.

Je n’ai pas été bien longtemps. Comme je n’apprenais pas facilement, on était un peu mis de côté.

Dans les débuts que j’allais à l’école, j’apprenais très bien avec Mme Deschamps.

J’étais dans les premiers, j’apprenais très bien. J’avais 6-7 ans. Mme Deschamps était grande.

La guerre est venue, on avait des profs, mais qui ne s’occupaient pas de tout le monde.

Ceux qui voulaient travailler, travaillaient, les autres étaient laissés pour compte.

Les profs qui s’occupaient de nous nous mettaient à fendre du bois ou nous disaient d’aller à la chasse.

Avec Pierre , un autre élève, il nous mettait à fendre du bois, dans le Cagibis. On était cultivateurs : on savait se servir des outils. Tu commençais à fendre du bois à 9-10 ans. Puis on aimait ça.

Personne ne s’occupait de nous. Si j’avais eu plus d’instruction, j’aurais eu plus de capacités.

Des comètes toutes neuves

On faisait le trajet à l’école à pieds avec des comètes. Les comètes étaient faites dans le bourg, chez Daniel.
Moi je m’en rappellerai tout le temps. J’en avais eu une paire toute neuve.

J’étais sur la place de l’église, la comète est partie et est retombée sur le talon. Voilà la comète cassée.

Je pense que c’est Pierre, le père à Mimi qui me l’avait réparée.

Quand je suis rentré à la maison et que le père a su cela, j’ai encore eu une volée.

En classe

Il y avait la petite classe et la grande classe. Il n’y avait que deux classes.

Il y avait la table et la banc ensemble avec l’encrier. Le bureau de l’instituteur était dans le bout de la classe.

L’instit avait un bout d’osier long comme ça (environ trente cm).

Il te cramponnais sur ses genoux, après on avait les fesses bien bleues. J’en ai gobé.

Un coup, on est allé à l’école, on avait déniché un nid de pie avec André, un copain.

J’avais accroché ma blouse dans un barbelé, j’avais un grand accroc. Je me suis fait engueuler par le maître d’école. Puis quand je suis rentré, c’était encore une autre volée. C’était comme ça.

Le Cartable et l’habillement

Comme cartable, j’avais une musette en tissu dans laquelle on mettait la bouteille de cidre et le casse-croute.

Les cahiers restaient bien souvent à l’école. On emmenait juste les livres pour apprendre les leçons.

Tout le reste restait à l’école dans le petit bureau.

Maintenant ils emmènent tout. Ma voisine, la petite, elle est chargée au retour de l’école.

Les seules chaussures qu’on avait, c’était des comètes toutes en bois.

Après il y a eu les galoches avec une semelle de bois et des lacets. C’était déjà mieux qu’avec des comètes.

Elles avaient des maillettes par en dessous. J’en ai porté de cela.

J’avais un blouse avec des culottes courtes, froid ou chaud, avec des bretelles.

La Maison

Quand tu descends la petite route de la Grimaudière, tu arrives dans la ferme où nous habitions.

À l’époque, il y avait des écuries qui sont devenues depuis des maisons d’habitation.

La première maison c’était l’écurie, le hangar, puis le débarras derrière.

Il y avait la cave et après la maison. Nous, on était dans la maison.

Par la cave tu allais directement dans l’étable. Dans l’étable il y avait quatre vaches et un boxe pour la jument.

Elle s’appelait Grisette, une petite jument très gentille.

Dans la maison, il y avait la cuisine et la chambre. Dans la cuisine, Jean et moi, on a dormi longtemps dans le même lit.

Dans la chambre il y avait les parents et les filles. André est né plus tard, à la Coindière.

Comme mobilier, il y avait la maie pour faire le pain. On laissait lever le pain dans les lits encore chauds le matin.

Le pain étaient mis dans des gèdes, placées dans les lits encore chauds.

Une armoire, la maie et la table. Il n’y avait pas grand meubles.

Il y avait un lit de coin avec une paillasse et une couette en plume et des gros draps épais.

L’Hôpital des Américains

Il y a eu un hôpital au Luc, dans la grande pré du Luc. Je m’étais fait soigner le doigt.

J’étais dans le mouloir à pomme pour enlever avec mon doigt un cailloux qui s’était fourré dedans.

Mon frère Jean est monté sur la roue en même temps et mon doigt était dedans. Il était pris.

C’est les Américains qui m’ont soigné. Il m’ont mis un pochon avec de la poudre.

Je suis retourné trois ou quatre jours plus tard, c’était bien repoussé.

Un américain m’avait pris directement quand il a vu ma main pleine de sang.

Il m’a mis dans la jeep et puis je suis allé directement me faire soigner.

Je me rappellerai toujours. Il n’y avait pas de blessé, mais tout était près pour les accueillir.

Il m’a descendu, puis m’a ramené, mon père avait mis un litre de goutte pour la peine, il était content avec ça.