Plongée au cœur des mémoires de l’abbé Hervouët et des archives départementales de Loire-Atlantique, Anne Legrais, passionnée de recherches historiques, partage le fruit de son travail dans son livre « Joseph Hervouët. 1910, 1969. Souvenirs d’un prêtre nantais. Déportation et Liberté », édité par l’association Histoire et patrimoine du pays de Châteaubriant (Hippac) et publié en septembre 2022.
La couverture de l’ouvrage sur l’abbé Joseph Hervouët a été dessinée par l’artiste-peintre de Châteaubriant Gary Harmer. | GARY HARMER / HIPPAC
Un article de Pauline Roussel de Ouest-France paru le 5 octobre 2022 lève le voile sur la vie de ce prêtre nantais, résistant déporté pendant la Seconde Guerre mondiale
Châteaubriant. Qui se cache derrière les rues Joseph-Hervouët ?
Deux rues portent son nom. Dont l’une se trouve être à Châteaubriant (Loire-Atlantique). Alors, qui est Joseph Hervouët ? C’est la réponse à laquelle répond Anne Legrais avec son éditeur, l’association Hippac, dans un ouvrage paru en septembre 2022.

« Deux rues, à Saint-Julien-de-Vouvantes et à Châteaubriant, portent le nom de Joseph Hervouët, mais personne ne sait de qui il s’agit. » C’est pour cette raison qu’Anne Legrais, « historienne amatrice » comme elle se décrit, a souhaité redécouvrir ce prêtre nantais, résistant déporté pendant la Seconde Guerre mondiale. À partir de ses mémoires, et d’une fouille méticuleuse dans les archives départementales.
De ses recherches, la Vouvantaise Anne Legrais en a fait un livre, paru en septembre 2022 et édité par l’association Histoire et patrimoine du pays de Châteaubriant (Loire-Atlantique), plus connue sous le nom Hippac.
La couverture de l’ouvrage sur l’abbé Joseph Hervouët a été dessinée par l’artiste-peintre de Châteaubriant Gary Harmer. | GARY HARMER / HIPPAC
L’ouvrage, à la couverture sobre dessinée par l’artiste-peintre Gary Harmer, brosse le portrait d’un homme de foi « humble, effacé, timide, d’une singulière simplicité ». Quant au titre, il parlera à bien des passants, curieux de savoir qui est Joseph Hervouët. Ils peuvent d’ores et déjà ajouter aux panneaux des rues ces mots : « 1910-1969. Souvenirs d’un prêtre nantais, Déportation et Liberté ».
La vie d’un résistant…
« Rares sont les personnes qui ont été déportées à Mauthausen et Dachau, et en sont revenues », introduit Anne Legrais, soutenue par l’historien castelbriantais Christian Bouvet dans ses recherches.
En effet, le personnage de Joseph Hervouët a marqué la Résistance dans le pays de Châteaubriant. Jeune prêtre de 34 ans, originaire de la commune de Saint-Lumine-de-Clisson, et vicaire instituteur à Saint-Julien-de-Vouvantes, il est actif dans le réseau Libé-Nord. « Il a donné sa vie aux autres en en cachant plusieurs personnes dans son presbytère et en les sauvant ainsi de la déportation. Il a fait son devoir, ce qu’il avait en conscience. »
… Et celle d’un déporté
« Le 21 janvier 1944, Joseph Hervouët est arrêté avec d’autres résistants du pays de Châteaubriant, sur dénonciation », raconte l’auteure. Il connaît alors les prisons de Nantes et d’Angers, puis le camp de Compiègne, avant d’être déporté dans les camps de concentration nazis de Mauthausen et Dachau. « Et, malgré l’horreur, il survit, contrairement aux milliers de déportés qui succombent sous le régime hitlérien », partage Anne Legrais,
À son retour des camps, Joseph Hervouët devient prêtre à Legé et à Nantes. Puis, curé de Montoir. Il passe onze années de sa vie à Châteaubriant. En 1951, il commence à parler. « Ses mémoires sur la déportation, il les a écrites à la demande des paroissiens », précise l’auteure.
Une lumière dans les ténèbres
« Cet ouvrage, c’est le parcours de vie d’un homme, de sa naissance à son décès en 1969 à Nantes, à partir de sources historiques qui n’ont encore jamais été publiées. Puis, je m’appuie sur ses mémoires pour raconter la suite de son histoire. Non seulement pour le faire connaître, mais aussi pour apporter de nouveaux éléments sur la déportation dans le pays de Châteaubriant. C’est un travail de devoir de mémoire. »
De plus, l’ouvrage « montre une lumière dans les ténèbres ». C’est en tout cas le souhait de son auteure, notamment à travers le récit d’une histoire originale dont Joseph Hervouët est témoin en 1944 à Dachau. « Le prêtre a participé à l’ordination d’un jeune diacre allemand par un évêque français dans la baraque des prêtres du camp. C’est un fait unique dans l’Histoire ! » conclut Anne Legrais.
Le Musée de la Résistance à Châteaubriant dresse le Portrait de Joseph Hervouët (1910-1969), résistant et déporté.
Ses mémoires
À partir de 1951, Joseph Hervouët commence à rédiger ses mémoires à la demande de ses paroissiens dans Le Petit Messager de Montoir, où il est curé de 1950 à 1957. Dans ces bulletins paroissiaux, il y relate ses souvenirs sur la déportation. Frappés par ce témoignage poignant et dramatique, de nombreux fidèles décident de reprendre ce récit et de le recopier. Il existe alors plusieurs versions encore en circulation, dont une conservée au musée de la Résistance de Châteaubriant.
Sur une centaine de pages, Joseph Hervouët raconte son calvaire. Tout commence le 21 janvier 1944, le jeune prêtre âgé de 34 ans termine sa messe à Saint-Julien-de-Vouvantes lorsque la police allemande, la Gestapo, vient l’arrêter. Débute alors un long et douloureux parcours jusqu’aux terribles camps de concentration nazis de Mauthausen et de Dachau. Il est rapatrié le 28 mai 1945. Durant ces 16 mois de captivité et malgré les souffrances endurées, Joseph Hervouët n’a jamais cessé de rester fidèle à sa mission.
Ce ne sera pas une plainte, ni l’explosion de sentiments de haine, mais simplement un témoignage de justice, de fidélité aux frères d’exil, et de prière pour les nombreux disparus.
L’abbé Joseph Hervouët
De nouvelles recherches historiques
Ce manuscrit, connu du plus grand nombre tant sa valeur historique et mémorielle sur la déportation est indéniable, permet d’éclairer une partie de sa vie, précisément son parcours de déporté. Mais qu’en est-il de son action en tant que résistant ?
L’historienne amatrice et Vouvantaise Anne Legrais a mené des travaux de recherches complémentaires afin de reconstituer le récit détaillé de la vie du religieux. Plongée au cœur des mémoires de l’abbé et des archives départementales de Loire-Atlantique, elle partage le fruit de son travail dans son livre Joseph Hervouët. Souvenirs d’un prêtre nantais. Déportation et Liberté, édité par l’association Histoire et patrimoine du pays de Châteaubriant (Hippac) et publié en septembre 2022.
Dans l’ouvrage composé de deux parties, elle y développe d’abord le parcours de vie de Joseph Hervouët, de sa naissance en 1910 à son décès en 1969 avant d’évoquer ses mémoires de déportation. La nouveauté et l’originalité de ce livre, c’est de découvrir Joseph Hervouët, alors membre actif dans la Résistance grâce à des témoignages inédits et de nombreux documents.
Hommage
Le prêtre Joseph Hervouët, résistant et survivant de la Déportation, a profondément marqué l’histoire du pays nantais et de Châteaubriant et ce livre lui rend un fabuleux hommage.