Chapelle Saint-Georges Guénouvry

C’est une petite chapelle, un peu pataude, accrochée au versant d’un coteau qui coule doucement vers une vallée humide où un ruisseau, escorté de jeunes saules, folâtre dans les herbes hautes.

Texte de Jean Bourgeon

extraits de http://www.mairie-guemene-penfao.fr/medias/2022/02/La-Chapelle-Saint-Georges-a-Guemene-Penfao-Jean-Bourgeon.pdf

Dans cette campagne toute vouée à l’agriculture on pourrait la prendre pour une grange mais son modeste clocheton témoigne d’une relation privilégiée avec le Ciel même si jamais, à la différence des orgueilleuses flèches des cathédrales, il n’accrocha le moindre nuage.

Autrefois elle servait de lieu de culte aux habitants de la frairie (section d’une paroisse) de Penfao trop éloignés de l’église
paroissiale au temps où le petit peuple n’avait que ses pieds pour se déplacer.

On s’y mariait, on s’y faisait « ensépulturer ». Elle est la dernière survivante d’un ancien prieuré, le prieuré Saint-Georges, fondé au début du Moyen-âge.

Le prieuré Saint-Georges


Un prieuré est un monastère dépendant d’une abbaye et placé sous l’autorité d’un prieur dépendant lui-même de l’abbé de l’abbaye-mère. Le 20 janvier 1670 le prieur de Saint-Georges est le « Révérand père frère François Gavaton prestre chanoine régulier de l’ordre de Saint Augustin de la congrégation de France prieur titulaire du prieuré Saint Georges de Guemné Painfault membre dépendant de
l’abbaye de Nostre Dame de Penpont » lit-on dans un aveu (un acte notarié qui se trouve aux Archives départementales de Loire-Atlantique)
.
Au 11e siècle on assiste à une éclosion des prieurés en Bretagne (environ 400 situés surtout en Haute-Bretagne) liée au renouveau monastique en cours à l’époque mais aussi à la volonté des seigneurs, petits ou grands, pour des raisons religieuses autant qu’économiques.

Ainsi, le duc de Bretagne fonde de nombreux prieurés dans les premières années du 11e siècle bientôt imité par les grands féodaux qui adjoignent un prieuré à leurs châteaux. Certaines familles, plus ou moins influentes, proposent aussi des terres aux moines pour s’implanter dans les campagnes.

Il n’est pas facile de savoir dans quelle mesure un prieuré est d’initiative abbatiale ou seigneuriale car si les moines sont évidemment partie prenante dans les fondations, il faudrait faire la part des choses entre ce qu’ils reçoivent vraiment et ce qu’ils demandent car certains démarchent les nobles pour fonder un prieuré sur leurs terres.
On a vu que le prieuré de Saint-Georges dépendait de l’abbaye Notre-Dame de Paimpont. C’est à la fin du 11e siècle que se
constitua une communauté bénédictine à « Penpont » sous l’égide de l’abbaye de Saint-Méen-le-Grand.

Les seigneurs de GaëlMontfort et de Lohéac, ainsi que l’évêque Pierre Giraud, profitèrent des conflits récurrents entre les moines de Penpont et ceux de Saint-Méen pour confier aux chanoines réguliers de Saint-Augustin le site de Penpont qui devint l’abbaye Notre-Dame de Penpont (ou Painpont) au début du 13e siècle. […]


Quand un seigneur concède des terres à des moines, le but premier de la fondation est religieux et renvoie à la recherche de prières
pour le salut de son âme et celles de sa parenté. À cette motivation principale on peut rajouter des raisons économiques.
Le seigneur offre des terres incultes à défricher aux limites de son domaine. […]

La création de prieurés s’achève pratiquement dans le cours du 12e
siècle. Certains disparaissent par la suite, surtout au 13e siècle, mais d’autres renaissent au 14e ou au 15e siècle après la reprise en main de l’abbaye mère par une autre congrégation.
C’est peut-être le cas de Saint-Georges.
L’abbaye Notre-Dame de Paimpont possédait 6 prieurés-cures, c’est à dire des paroisses dont des chanoines Augustins de Paimpont étaient les recteurs et 16 prieurés simples dont Saint-Georges.

La chapelle et son cimetière

La chapelle est le cœur de la frairie. Vers ses lourds murs en moellons de grès ou de schiste et son petit clocher prolongé d’une flèche octogonale convergent la religiosité, l’affectivité, la convivialité des villageois.
Maison de Dieu elle est aussi maison des hommes, lien entre leur quotidien et l’éternité.
On y est venu dès le plus jeune âge pour les fêtes votives et les processions. On y a prié pour éloigner la peste ou la guerre. On y a reçu le sacrement du mariage. Les plus notables s’y réunissent pour débattre des affaires de la frairie. Plus tard on y sera enterré ou, à défaut, dans le petit cimetière qui l’entoure.
Nous ne savons pas quand fut construite la première chapelle du prieuré Saint-Georges.
Celle que l’on connaît aujourd’hui est sans doute une restauration ou une reconstruction réalisée vers le 15e siècle d’un édifice antérieur
orné de quelques décors peints . Allons-y faire une visite dans ces années qui constituent le « Grand Siècle » ; celui de Louis XIV.
Après avoir traversé le cimetière qui borde la chapelle sur trois côtés, pénétrons dans le petit sanctuaire par la porte latérale, celle
qu’utilisait généralement le chapelain. Dans l’encadrement de la porte, un bénitier est aux trois quarts enfoncé dans l’épais mur de
pierre.


À l’intérieur, le chœur orienté à l’est est éclairé par deux fenêtres latérales en plein cintre. La nef, d’un dépouillement monacal
dans la lumière pâle tombant de deux fenêtres, n’a de mobilier que l’indispensable :
un confessionnal, un coffre pour ranger les cierges, une armoire pour les vêtements sacerdotaux, un banc pour les fidèles fatigués et les réunions des responsables de la frairie.
On assiste à l’office debout ou assis à même le sol de terre battue. Par endroit, des taches claires signalent qu’on l’a récemment retournée cette terre pour y inhumer, dans un simple linceul, les défunts du village.
Au fond, devant le portail, une corde descend du clocher. C’est elle que l’on tire pour carillonner les mariages ou pleurer le glas des
enterrements. Une échelle est appuyée contre le mur. Elle permet de monter dans la chambre de cloches et d’aller vérifier si le plafond
de planches brutes qui constitue le ciel de l’édifice n’a rien à craindre de l’incontinence d’un toit fatigué.


Le chœur est séparé de la nef par une clôture à balustres plats, en bois. Quelques marches permettent d’accéder aux trois autels, aussi en bois, appuyés contre un mur droit recouvert d’un retable du 18e aux panneaux moulurés. L’autel principal domine modestement deux autels latéraux consacrés l’un au Saint-Esprit, l’autre à Notre-Dame ce dernier surmonté d’une statue de la Vierge.
Ces autels latéraux servent aussi de placards fermant à clé. On ne sait s’il y a un tableau au-dessus du maître-autel mais la chapelle
possède un « Ecce homo ». S’agit-il d’une statue, d’une peinture ou d’une gravure ?
Une statue de Saint-Paul datant de la fin du 16e siècle et quatre chandeliers en bois tourné complètent le décor. Sous les fenêtres
du chœur, les murs sont creusés de niches fermées par une petite porte. On y conserve de précieuses reliques.
On s’agite autour de la croix du cimetière.
Les villageois arrivent pour l’office. Effaçons-nous.

Plus d’infos sur http://www.mairie-guemene-penfao.fr/medias/2022/02/La-Chapelle-Saint-Georges-a-Guemene-Penfao-Jean-Bourgeon.pdf